un référendum sur l’immigration n’est «plus à l’ordre du jour»
, modifié à
Emmanuel Macron a longuement discuté de la situation internationale vendredi avec les chefs de parti qui avaient répondu présent pour les deuxièmes “rencontres de Saint-Denis”, avant d’entrer dans le vif du sujet sur l’élargissement du champ du référendum et les réformes institutionnelles.
Comme le 30 août, rendez-vous avait été donné à la Maison de l’éducation de la Légion d’honneur, à deux pas de la basilique où reposent les rois de France. À 9 heures 30, la réunion a commencé. Et comme précédemment, Emmanuel Macron a d’abord livré, trois heures durant, son analyse de la situation internationale, selon un participant. Eric Woerth, député Renaissance, a ensuite présenté les grands principes de sa mission sur la décentralisation. L’élargissement du référendum aux sujets de société et la simplification du référendum d’initiative populaire ont ensuite été évoqués.
Emmanuel Macron nourrit “la crise de la démocratie”
Mais sur le thème de l’immigration, le chef de l’État et les chefs de partis ont conclu qu’un référendum n’était pas d’actualité en l’absence de consensus sur le sujet, selon plusieurs participants. “Il n’y aura pas de référendum sur l’immigration”, a annoncé Marine Tondelier (EELV). “Un consensus s’est dégagé autour de la table sur le fait qu’il paraissait compliqué d’élargir la possibilité de tenir des référendums sur des sujets sociétaux tels que l’immigration”, a renchéri Fabien Roussel (Parti communiste). “Le président n’envisage pas pour l’instant cette possibilité”, a affirmé Jordan Bardella (Rassemblement national), seul participant présent à réclamer cette consultation.
Pour ce nouveau rendez-vous, Éric Ciotti (Les Républicains), Olivier Faure (Parti socialiste) et Manuel Bompard (La France Insoumise) avaient fait défection, au grand dam du chef de l’État qui entend ainsi “créer du consensus” dans un pays fracturé. Les absents, “je peux les comprendre”, a déclaré le chef du PCF Fabien Roussel à son arrivée, dénonçant “l’impasse démocratique” avec “un 49.3 par semaine” dans un “Parlement bafoué”, en référence à l’article de la Constitution qui permet l’adoption d’un texte sans vote. Lui, est venu représenter une “voix de gauche” et défendre notamment le pouvoir d’achat.
Marine Tondelier (EELV), en revanche, a jugé “très important d’être là”, sans quoi on tombe dans “une incommunicabilité préjudiciable et inquiétante”. Elle a néanmoins critiqué un Emmanuel Macron qui “entend beaucoup plus de l’oreille droite que de l’oreille gauche” et rappelé son souhait de “mettre l’écologie à l’ordre du jour” de cette discussion. “Je suis à la tête d’un parti de gouvernement”, a de son côté justifié Jordan Bardella (RN). “Chaque fois que la République nous convoque, nous répondons présent”. Le chef de l’État peut compter sur ses alliés, Stéphane Séjourné (Renaissance), François Bayrou (MoDem), Édouard Philippe (Horizons), Laurent Hénart (Parti radical).
“En démultipliant les initiatives extérieures au champ institutionnel, vous participez à les affaiblir et à nourrir la crise de la démocratie”, a fustigé Éric Ciotti dans une lettre ouverte dont l’AFP a obtenu copie. La discussion “doit être publique, soit au Parlement, où le peuple délègue ses représentants, soit directement avec le peuple lui-même par référendum”, insiste-t-il. Les Républicains sont néanmoins représentés par un acteur de poids, le président du Sénat Gérard Larcher, invité au même titre que la présidente de l’Assemblée Yaël Braun-Pivet. Hervé Marseille (UDI) et Guillaume Lacroix (PRG) assistent également à la rencontre.
Le chef de l’État sent “que le temps lui est compté”
À gauche, on dénonce “une mise en scène” selon Olivier Faure, ou “un exercice monarchique”, “un format à huis clos” pour La France insoumise. Des jugements négatifs sur l’exercice aussi portés par 61% des Français, selon un sondage Odoxa pour Le Figaro. Éric Ciotti a également justifié sa défection par l’absence du chef de l’État à la marche contre l’antisémitisme dimanche. Olivier Faure refuse quant à lui de cautionner un possible référendum sur l’immigration.
Dans ce contexte pesant, le chef de l’État va mettre un point d’honneur à démontrer que les absents ont toujours tort. S’il veut montrer qu’il s’est “laissé convaincre par des idées qui n’étaient pas nécessairement les siennes”, il “faut que ça dure un peu longtemps”, résume le politologue Bruno Cautrès qui n’exclut pas un “coup politique” présidentiel avec une “solution institutionnelle un peu innovante”.
Le chef de l’État, qui ne peut se représenter en 2027, “commence à sentir que le sablier est en train de se retourner, le temps lui est compté”, poursuit le politologue. Il lui faut donc “poser des actes” qui forgent un bilan, avec un texte sur la fin de vie et la modernisation de la Ve République, esquisse-t-il. Mais si, à l’issue, “les leaders de l’opposition ressortent en disant, c’est très sympa de ‘casse-croûter’ avec le président de la République, mais ‘so what’ (et alors), il n’y aura pas de troisième fois”, avertit Bruno Cautrès.